Post-Apocalyptic Hold’Em : motors head’s up (1/2)

J’avais échappé à un vrai carnage. Aussi loin que je me souvienne, je n’avais jamais vu autant de fureur pour stopper de simples « rounders ». Malgré la loi qui les classifiait désormais en « type 5 », ces joueurs clandestins n’avaient, jusqu’à présent, fait l’objet que d’arrestations musclées.
Ceux-là devaient être spéciaux. Devaient “avoir été” spéciaux, vu ce qu’il en restait.

Avant leur regroupement dans l’arrière-boutique, quand Molly était encore seule sur place, j’avais été appelé pour installer et régler le Cerbère semi-mécanique. Je finissais à peine les réglages quand les premiers invités étaient arrivés, m’éclipsant alors dans un coin d’ombre pour échapper à leur observation.
J’avais reçu une formation de mécanique qui faisait de moi l’un des rares hommes à pouvoir intervenir sur des robots d’ancienne génération. Alors que le Gouvernement avait profité de sa main-mise sur le boom technologique, nous autres, les “meca-wizzs”, avions raté le train de l’électronique et des implants. C’était donc faute de véritable choix, que nous avions commencé à monnayer notre savoir-faire auprès de la Résistance ; pour intervenir sur leurs robots clandestins.

Les joueurs étaient extrêmement concentrés. Aussi bien sur leur jeu que sur le décryptage des tells. La tension avait été grandissante, puis étouffante, jusqu’à cet instant irréel où la Milice était entrée en fracas.
Ma curiosité s’était alors évaporée, et j’avais profité de ma position discrète pour détaler aussi vite que possible. Tout juste avais-je eu la présence d’esprit de voler une paire de lunettes HD-Case laissée en consigne par l’un des joueurs.
Il ne m’avait fallu que quelques secondes pour traverser le vestibule qui donnait sur l’arrière-cour. Elles m’avaient paru une éternité pourtant, car pour préserver mon invisibilité, je m’étais retenu de courir à toutes jambes. Le stress avait provoqué des douleurs fulgurantes dans mes articulations, et je ne me déplaçai que difficilement. La porte de sortie fut donc un vrai soulagement, et je me surpris à cavaler à toute vitesse une fois sur les pavés de la cour.

Malheureusement, ma sortie ne fut pas aussi furtive que je l’espérais. En traversant les rues alentours, j’avais été repéré par des sentinelles postées à l’extérieur. Je les entendis crier vivement, et se rapprocher de moi à vive allure. Pris de panique, me projetant d’un coin d’ombre à un autre, j’attrapais des poubelles et tous les objets passant à ma portée, les faisant voltiger après moi désespérément, pour ralentir mes poursuivants et gagner quelques secondes.

J’eus alors la surprise de me retrouver seul quand, à bout de souffle, je me retournai enfin. Sans que je le sache, les officiers avaient procédé au décompte des corps, là-bas, dans la salle de jeu. Ils étaient satisfaits de leur prise, préparaient déjà mentalement leur rapport, et avaient donné l’ordre à leurs hommes de rester groupés. Sans doute me considéraient-ils comme un événement mineur. Et je l’étais bien, à vrai dire.

Soulagé par cette solitude nouvelle, je m’orientai chaotiquement vers la place Saint-Ferdinand, proche de la Porte Maillot, où j’avais laissé ma moto quelques heures plus tôt. Mon cerveau en ébullition n’avait pas eu le temps de digérer toutes ces informations, et les cartes plastifiées dansaient devant mes yeux en même temps que les rues détrempées. J’entendais les joueurs parler laconiquement en même temps que les coups de feu, la musique des jetons et les hovercrafts bourdonnants.

L’esprit toujours embrumé, j’arrivai enfin sur le trottoir où ma moto était garée. Une vieille Monster 900 noire de 1998, autant dire une antiquité, dont le moteur rustique me convenait parfaitement. Elle était dépourvue de traceur électronique, de sorte que je pouvais rester hors de portée des radars-drones, tant que je restais en dehors de leur champs visuel.

Elle démarra dans un grondement, et je la glissais doucement sur la chaussée pour m’enfuir définitivement.

Les minutes qui suivirent furent complètement psychédéliques. La longue attente dans la salle de jeu, combinée à la décharge d’adrénaline qui avait suivi, agissaient comme une drogue furieuse qui emballait mon cerveau. J’étais assis autour du feutre ; je manipulais les jetons ; je relançais et sur-relançais furieusement ; tout ça en zigzaguant entre les files de véhicules auto-portés.

A suivre…

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